"Sur les affiches, ce serait sans effet"

L'année dernière, une centaine de jeunes talents ont participé par équipes de deux à l'ADC Young Creatives Award afin de décrocher, en plus du trophée, une place à la Young Lions Competition. Le sponsor principal et l'organisateur du concours était la Suva. On recherchait des idées de communication pour protéger les apprentis contre les risques d'accident au travail. Werbewoche présente dans une série les quatre équipes gagnantes qui se rendront cette année à Cannes.

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Mathias Kröbl et Ricky Bruderer sont les gagnants de la catégorie Médias alternatifs. Nous avons discuté avec eux de l'omniprésence de la publicité.

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Ricky Bruderer (28 ans, à gauche) et Mathias Kröbl (22 ans)

WW : Que signifie exactement la catégorie des médias alternatifs ?
Ricky : Elle représente ce qui n'entre pas dans les catégories classiques. Une campagne de médias alternatifs se caractérise par le fait qu'elle se déroule dans des situations inhabituelles et surprenantes dans l'environnement direct du récepteur. Elle veut sortir de ce que l'on a vu jusqu'à présent.
Mathias D'habitude, le média détermine fortement la publicité. Avec les médias alternatifs, c'est différent. On place un objet là où on ne l'attend pas.

WW : Vous avez créé des vêtements qui ont un handicap et qui doivent être accrochés dans les magasins H&M. Vous avez également créé une campagne d'affichage. Quels avantages voyez-vous dans une telle action de média alternatif ?
Ricky : Lorsqu'il s'agit d'une publicité classique, une censure interne apparaît immédiatement chez le récepteur. Dans le cas d'une action de média alternatif, les jeunes sont plus réceptifs, car cela se déroule dans une situation habituelle.
Mathias Exactement. On passe son temps libre à chercher un t-shirt chez H&M, on en sort un du rayon et ce n'est qu'alors qu'on se rend compte : Quelque chose ne va pas. Le message envahit les jeunes de manière spontanée et inattendue. Là où ils se sentent bien et où ils se détendent avec leurs amis.
Ricky : L'idée ne fonctionne que comme ça. Sur une affiche, les vêtements ne font pas d'effet. Si l'on découvre le T-shirt en faisant du shopping, il est plus facile de s'imaginer la dure réalité d'un accident du travail. C'est précisément sur cette capacité humaine que notre action mise.

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WW : Selon vous, existe-t-il des lieux qui devraient être exempts de publicité ?
Mathias Il est difficile pour moi de répondre à cette question. Il y a une différence entre le fait de vouloir atteindre un but en tant que publicitaire et le fait de faire partie du groupe cible. En tant que publicitaire, tu es plus ouvert à la recherche de solutions qui sont peut-être trop violentes pour le groupe cible. Tu veux atteindre un objectif. En tant que consommateur, tu accordes en revanche beaucoup plus d'importance à la sphère privée. En tant que publicitaire, tu as certes ce groupe cible à l'esprit, mais tu vas un peu plus loin.
Ricky : D'un point de vue moral, on peut déjà dire que l'on ne veut pas importuner les gens avec des messages publicitaires envahissants ou violer leur vie privée. Mais en tant que publicitaire, il s'agit avant tout d'être créatif. Les idées doivent générer de plus en plus d'attention, car elles sont en concurrence avec un nombre croissant d'informations. Fondamentalement, je pense qu'il faut laisser aux gens des possibilités d'évasion. S'ils se sentent abusés, c'est qu'on est allé trop loin.

WW : En d'autres termes, quelle est la publicité qui vous énerve ?
Mathias Grâce à mon métier, j'ai également un autre point de vue en tant que récepteur. Contrairement à mon amie, par exemple, qui est souvent agacée par les publicités télévisées répétitives. Depuis que je travaille dans la publicité, mon point de mire est très différent : j'analyse la publicité.
Ricky : La publicité à la télévision m'agace aussi parfois. Et celles sur Youtube, je les trouve extrêmement intrusives. Mais cela dépend de la publicité. Si elle est bonne, je la regarde volontiers. Dans l'ensemble, la publicité ne me dérange guère. En Suisse, il y a surtout de la publicité classique, que l'on peut facilement décider d'ignorer.

WW : Pourquoi pensez-vous que votre publicité (non classique) attire les gens de manière positive ?
Ricky : Je trouve qu'elle est honnête. Il ne s'agit pas de vendre quelque chose, mais d'éduquer les consciences. Notre idée est en outre conçue comme une action de guérilla, qui ne prévoit aucune coopération avec H&M. Cela lui donne un air courageux. Et finalement, nous voulons aussi laisser des traces. La sécurité au travail est un sujet sérieux. Beaucoup de choses sont justifiées pour faire passer ce message.

Entretien : Simone Isliker

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