La créativité programmatique montre-t-elle l'avenir de la publicité ?

Après le développement du programmatique, la technologie qui a automatisé quasiment tout le processus d'achat d'espaces publicitaires, voici venu le temps de la créativité programmatique. Dans sa contribution d'invité, Pierre Berendes montre que la combinaison fondamentalement antinomique de ces deux termes recèle un grand potentiel pour les annonceurs.

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Il y a 20 ans, un seul écran - la télévision - suffisait pour atteindre les consommateurs. Aujourd'hui, nous jonglons entre le mobile, le desktop et les tablettes. Le public, moins linéaire, répartit son attention sur plusieurs écrans, ce qui signifie pour les marques qu'elles doivent constamment adapter leurs messages. C'est précisément là que le programmatique entre en jeu.

Le seul problème est que, pour des raisons de temps et aussi de simplicité, le message atteint généralement toutes les audiences sur tous les supports sous la même forme. La créativité se limite souvent à un petit ou un grand rectangle. Dans ces conditions, il n'est pas facile d'atteindre la bonne audience. La créativité permet de pallier ce manque.

Ce nouveau concept fait référence à l'utilisation de technologies qui accélèrent, automatisent et multiplient les possibilités de création de bannières. Grâce à cette approche, il est désormais possible de traiter simultanément la production et l'optimisation du message. En associant les médias et la créativité, les marques peuvent rendre leurs messages plus informatifs, plus captivants et plus attrayants.

 

La fin annoncée de la bannière publicitaire

La créativité programmatique va notamment permettre de segmenter le public en plusieurs groupes et de s'adresser à eux avec des messages personnalisés. Fini la même bannière pour tous !

Et grâce à la multiplication des formats, il sera également possible de créer différentes variantes de messages. Cette nouveauté permet un nouveau dialogue entre les marques et ses consommateurs. Les messages seront adaptés automatiquement et dynamiquement aux différents canaux et écrans via le partage des options de ciblage (âge, langue, localisation, intérêts, ...) et l'intégration d'éléments dans les bannières mobiles, selon les fonctionnalités du support (écran tactile, localisation, possibilité d'appel).

Pour concevoir ces créations toujours plus raffinées, les données sont indispensables. Il est ainsi possible d'identifier le bon message à envoyer à un groupe cible spécifique. Grâce à cette nouvelle technologie, il est possible de créer des messages à grande échelle de manière automatisée et de les tester dans différentes variantes.

 

Des milliers de variantes possibles adaptées en temps réel !

Concrètement, le designer peut produire 20 formats en même temps : un vrai gain de temps. Des variations sont ensuite définies pour chaque groupe cible : publicité localisée, offre de produits différenciée ou différents points d'accroche. Avec des résultats en temps réel, les marques peuvent apporter des modifications très rapidement. L'objectif est toutefois de s'assurer que 99% des messages diffusés sont des variantes de l'offre initiale.

Supposons par exemple qu'un office de tourisme souhaite attirer les amateurs de sports d'hiver. Certains seront des skieurs alpins, d'autres préféreront les randonnées en raquettes, le bien-être ou simplement la terrasse ensoleillée ! La créativité programmatique permet de créer et de tester plusieurs variantes du même message jusqu'à ce que l'on trouve celle qui fonctionne le mieux en fonction du groupe cible, du niveau d'enchère de l'espace publicitaire, de la fréquence ou du site web qui le diffuse.

Il est également possible de présenter des "nouveautés" en utilisant une rotation, un séquençage ou une adaptation du message en temps réel. Il est ainsi possible de s'adresser individuellement à (presque) chaque utilisateur.

 

Quels sont les défis à relever pour réussir la créativité programmatique ?

Pour y parvenir, les marques doivent intégrer deux technologies complémentaires dans leurs campagnes programmatiques : la CMP (Creative Management Platform), qui gère le processus de fabrication des bannières, et la DCO (Dynamic Creative Optimization), qui optimise les bannières en se basant sur l'apprentissage automatique. Alors que la DCO est considérée comme une technologie permettant de créer des milliers de variantes de bannières, la CMP bénéficie également de la puissance en matière d'UX et de design, grâce à des outils puissants comme Google Studio.

Le principal obstacle à l'essor de l'utilisation de la créativité programmatique réside clairement dans la quantité de ressources disponibles à cet effet. Une marque prévoit en moyenne un shooting photo par saison, soit quatre par an au maximum. Mais pour développer suffisamment de variantes, il faut cinq fois plus de ce matériel. En réalité, les données de première partie ne sont utilisées que pour 4 % des campagnes ; 68 % des campagnes sont mises en place sans données de ciblage. C'est dommage, car l'amélioration de la performance avec la créativité programmatique est estimée à +30%.

En outre, le manque de synchronisation entre les producteurs de messages, les acheteurs de médias et les analystes de données est le véritable défi de la créativité programmatique.

Pour que l'impact soit total, les murs entre ces différents acteurs du canal publicitaire doivent tomber. Les annonceurs doivent également changer leur perception. Au lieu de parler d'impressions visibles, ils devraient plutôt se focaliser sur la reconnaissance. Aujourd'hui, on parle de plus en plus d'engagement ou de brand recall - c'est déjà un bon début !

* Pierre Berendes est Managing Director de Gamned ! Switzerland.

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