Les voitures aussi racontent des histoires

Malgré les contraintes budgétaires, une publicité automobile exceptionnelle n'est pas un luxe

Malgré les contraintes budgétaires, une publicité automobile exceptionnelle n'est pas un luxepar luca aloisiL'année dernière, les investissements bruts de la branche automobile ont certes reculé de 4,6% pour atteindre environ 336 millions de francs (Mediafocus 2000). Malgré cela, l'industrie automobile reste le deuxième plus grand annonceur de Suisse. Toutefois, sa publicité a la réputation d'être assez simpliste. Ce qu'elle a d'ailleurs confirmé ces derniers temps avec des campagnes qui se ressemblent comme deux gouttes d'eau.
Un nombre impressionnant de travaux sont régulièrement présentés dans la catégorie automobile lors de concours internationaux. Mais le résultat est souvent médiocre. Les agences de publicité suisses n'y sont pour rien, car elles ne créent guère de campagnes automobiles dans notre pays. Les bureaux de création suisses se limitent principalement à l'adaptation de campagnes créées par des agences leaders à l'étranger pour le village global. Les campagnes spéciales nationales sont plutôt mal vues.
Il est rare que des annonces extraordinaires, et encore moins des spots télévisés, sortent du lot. Le schéma reste le même : la voiture est un élément visuel important. Pour créer un profil identitaire propre à la marque, il est préférable d'y ajouter un sentiment de vie, de beaux paysages et de belles personnes, ainsi que quelques formules qui sonnent bien, comme "la réalisation des ambitions" (Lexus) ou "la force de la discrétion" (Jaguar). Et voilà, les modèles d'identification pour les acheteurs sont prêts.
Il y a un peu plus de trois ans, la majorité des marques avaient déjà renoncé à mettre en œuvre des raisons rationnelles telles que le rapport qualité-prix ou la longévité, les éléments émotionnels du design et de l'art ont pris le dessus dans la recette publicitaire pour les voitures.
Si l'on feuillette les suppléments du 71e Salon international de l'automobile de Genève, on constate que le design automobile s'est imposé comme le principal vecteur de vente. Les histoires ne sont plus guère racontées. Réduction au produit plutôt que décoration du label avec des codes distrayants. Telle semble être la devise, surtout lors des lancements sur le marché, comme le démontre de manière frappante et frappante l'exemple de la Mini de l'agence Sulzer Sutter, même si elle a dû s'adapter au corporate design imposé d'une campagne internationale qui n'est pas encore prête.
Le copropriétaire Roland Sutter se défend de toute généralisation : "Pour BMW, nous essayons toujours de faire de la publicité thématique avec des éléments supplémentaires, afin de nous éloigner de l'érotisme pur de la tôle". Il admet toutefois que la voiture, en tant qu'objet de désir, continuera à jouer un grand rôle dans les espaces visuels restreints. De plus, d'autres présentations de biens de consommation ne remportent que rarement des prix lors de concours créatifs.
D'un point de vue formel, beaucoup d'annonces ressemblent à des mini-annonces, comme celle pour l'Alfa 147. Dans celle-ci, comme dans presque toutes les campagnes automobiles, la Cuore sportivo ne semble battre que pour la réalisation du spot. Un conducteur "invétéré" d'Alfa y affronte les forces primaires de la nature et gagne son pari contre un ouragan. Après avoir réussi l'épreuve de courage, un tracteur soulevé par le vent s'enfonce dans la terre à côté de la 147 épargnée.
Seules quelques agences suisses qui s'occupent de clients automobiles racontent également des histoires dans leurs annonces. Et le nombre d'agences qui savent le faire malgré les CD prescrits au niveau international est encore plus faible. C'est le cas de Studer & Wohlgemuth, qui fournit à Mercedes-Benz (Suisse) une part importante de création propre depuis 1992.
"Nous profitons de la communication décentralisée avec une stratégie de marque commune et un concept CD", explique Guido Studer. La communication décentralisée suit de manière conséquente la stratégie de marque de Mercedes, qui s'articule autour des trois thèmes tendance que sont le style de vie, la multifonctionnalité et l'individualité. L'agence zurichoise travaille également selon ces principes, qu'il s'agisse d'adapter des campagnes, de les topper, de les découper ou de les concevoir elle-même pour le marché suisse.
Chez Lowe Linta GGK, à Zurich, le CD Mark Stahel s'accommode également des éditions internationales, car "grâce à la grande liberté d'action, plus de la moitié des annonces VW sont des créations personnelles". C'est chez lui qu'est né, entre autres, le sujet de la Golf sans voiture, mais avec un canard en tôle à remonter, "parce qu'on connaît de toute façon déjà la Golf". La conclusion de Stahel : sans stop et sans résolution avec une bonne chute, aucune campagne originale ne peut voir le jour, même dans la publicité automobile.

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