"La technologie blockchain va bouleverser le marketing"

La blockchain est souvent assimilée au bitcoin. Or, le bitcoin n'est qu'une application basée sur la technologie blockchain. La blockchain est bien plus et peut faire beaucoup plus - notamment dans le domaine du marketing. L'auteur Jörg Eugster a formulé trois thèses à ce sujet.

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Récemment, j'ai assisté à un congrès pour les start-ups à Berlin. Une conférence a retenu toute mon attention : "How to build a blockchain node into a Porsche car". Les intervenants expliquaient qu'ils étaient sur le point d'intégrer la blockchain dans une voiture, une Porsche Panamera. Ainsi, la voiture devient un node. Un nœud est un appareil connecté à un réseau blockchain. Les intervenants ont expliqué différentes applications possibles. Selon eux, l'une d'entre elles consisterait à permettre au prestataire de services de livraison de colis d'accéder au coffre de la voiture sur le parking de l'entreprise via la blockchain. Le livreur pourrait ainsi déposer lui-même le colis dans le coffre. D'autres applications possibles seraient par exemple le road pricing et un système de facturation automatique pour le stationnement. Vous vous rendez en ville et, en fonction du quartier et de l'heure, de petits montants sont automatiquement débités de votre portefeuille intégré à la voiture grâce à une combinaison de capteurs, de l'Internet des objets et de la blockchain. La vignette n'est alors plus facturée de manière forfaitaire par an, mais on vous demande de payer pour la prestation effectivement utilisée. Il en va de même pour le stationnement. Vous vous rendez sur une place de stationnement et vous en repartez après un certain temps. Ceci est enregistré par des capteurs et transmis à la blockchain. En repartant, la taxe est prélevée, non pas en francs ou en euros, mais dans la crypto-monnaie correspondante. C'est ainsi que l'on appelle les systèmes de valeurs dans une blockchain. Chaque cryptomonnaie a ses coins ou jetons. Une crypto-monnaie intéressante pour le secteur automobile est IOTA, qui permet d'effectuer de tels processus M2M (Machine to Machine). Volkswagen et BMW, entre autres, sont en train d'évaluer des projets basés sur la technologie blockchain de IOTA.

Tout à la fin de l'exposé "How to build a blockchain node into a Porsche Car". j'ai demandé à l'ingénieur qui avait fait la présentation pourquoi elle développait cela avec la blockchain et non avec des technologies actuelles et connues. Il a répondu de manière lapidaire : "It's safer thanks to the blockchain". Et cela nous amène à mes trois thèses sur la manière et la raison pour laquelle la technologie blockchain va changer durablement le marketing, car ce "it's safer..." joue également un rôle ici.

Mes trois thèses pour un avenir glorieux dans le marketing grâce à la blockchain :

1. la blockchain va rendre absurde le RGPD

2 : Une signature numérique basée sur la blockchain rend impossible les fake bots et plus difficile les fausses nouvelles.

3 : Facebook ne sera plus pertinent dans cinq ans en raison de l'identité numérique basée sur la blockchain.

Dans les paragraphes suivants, j'aimerais justifier et défendre mes thèses.

Thèse 1 : la blockchain va rendre le RGPD absurde.

Le règlement général de l'UE sur la protection des données (RGPD) a pour objectif de protéger la vie privée des utilisateurs. L'utilisateur doit consentir à ce que des données le concernant soient enregistrées. Les données personnelles d'utilisation et de mouvement sont très sensibles. L'utilisateur ne souhaite pas forcément les voir stockées publiquement. Dans les applications de chaîne de blocs, chaque transaction est enregistrée publiquement sur la chaîne de blocs concernée, mais il n'est pas possible de l'attribuer à un utilisateur. Les données restent donc généralement anonymes. Il est intéressant de noter que grâce au RGPD, un utilisateur peut demander la suppression de données. Sur la blockchain, il n'est techniquement pas possible de supprimer des données. Mais grâce à cette technologie, les utilisateurs retrouvent la souveraineté sur leurs données et peuvent décider eux-mêmes de l'utilisation qu'ils veulent en faire. Mais maintenant, le plus important : grâce à la blockchain, l'utilisateur pourra être dédommagé pour ses données, s'il souhaite les "donner", mais aussi pour ses contributions avec une crypto-monnaie. Un modèle possible serait que nous puissions être suivis anonymement via l'application d'une société de commercialisation d'affiches. Celle-ci pourrait ainsi mettre à la disposition des annonceurs des données de bien meilleure qualité pour le ciblage. De son côté, l'utilisateur de l'application reçoit des jetons qu'il peut utiliser pour des produits et des services. Un programme de fidélisation 2.0, en quelque sorte. De telles idées ne sont plus de la musique d'avenir lointaine. La SGA a annoncé qu'elle étudiait actuellement une collaboration avec IOTA, à la preuve de concept de laquelle elle a déjà participé. Si, grâce à l'Internet des objets et au Machine-to-Machine, IOTA peut effectuer des paiements automatisés avec une Porsche, elle peut aussi le faire avec une application pour smartphone. Le smartphone devient ainsi un nœud, comme la Porsche dans l'exemple ci-dessus.

En bref : si les utilisateurs peuvent explicitement autoriser l'accès anonyme à leurs données, le RGPD est poussé à l'absurde, car la blockchain peut mieux mettre en œuvre les exigences qui sous-tendent le RGPD que n'importe quelle loi.

Thèse 2 : une signature numérique basée sur la blockchain rend les fake bots impossibles et les fausses nouvelles plus difficiles.

Imaginez que vous ayez une signature numérique sur la blockchain. La ville de Zoug en propose d'ailleurs déjà une à ses citoyens. À la naissance, votre acte de naissance est enregistré sur la blockchain. De plus, toutes les adresses de résidence que vous avez eues au cours de votre vie, tous les diplômes, tous les certificats, toutes les vaccinations, tous les résultats médicaux, bref, toutes les données pertinentes pour vous et votre parcours de vie y sont déposées. Mais vous êtes le seul à y avoir accès. Tout est public, mais vous êtes le seul à disposer de la clé privée. Lors d'une candidature à un emploi, vous mettez à la disposition de l'employeur potentiel le cluster de données "CV" avec tous les titres scolaires, diplômes et certificats. Lors d'une visite médicale, vous pouvez mettre à la disposition du médecin le cluster de données "Données de santé". Lorsque vous vous connectez à un portail ou à une boutique en ligne avec votre identifiant numérique, c'est vous, et vous seul, qui décidez des données que vous autorisez. Lors d'une commande, vous devez enregistrer votre adresse de livraison. En cas de changement de domicile, vous modifiez la nouvelle adresse de manière centralisée sur la blockchain, qui est alors immédiatement disponible pour tous les e-shops autorisés. Aujourd'hui, vous devez la modifier dans chaque boutique. Quelle charge de travail ! Et maintenant, imaginez que tout ce que vous publiez, commentez et aimez est lié à votre ID numérique. Tout le monde voit immédiatement s'il s'agit d'un faux bot, car un faux bot n'a pas d'acte de naissance que l'on pourrait enregistrer sur la blockchain. Cela rendrait également plus difficile la diffusion de fausses nouvelles, car l'auteur pourrait être identifié sans aucun doute.

Thèse 3 : Facebook ne sera plus pertinent dans cinq ans en raison de l'identité numérique basée sur la blockchain.

Sur un réseau social basé sur la blockchain et mettant à disposition un identifiant numérique, de nouveaux modèles commerciaux seraient possibles. Nous ne paierions plus la publicité avec nos données, mais serions même récompensés pour nos contributions et interactions. Plus celles-ci gagneraient en considération grâce aux commentaires, aux likes et aux partages, plus nous recevrions en retour du réseau - sous forme de crypto-monnaies propres à la plateforme. Et ceux qui ne souhaitent pas participer, mais seulement observer, paient une petite contribution mensuelle dans cette même monnaie afin de garantir le fonctionnement de la plate-forme. Ce n'est pas non plus de la pure musique d'avenir : les premiers réseaux qui utilisent de telles technologies et tentent de s'attaquer à la suprématie de Facebook existent déjà. La question est la suivante : Facebook peut-il empêcher sa chute ? En principe oui, mais Facebook a peut-être déjà perdu trop de bonne volonté. L'appel à supprimer son compte Facebook (hashtag #DeleteFacebook) ne fonctionne pas tant qu'un challenger n'a pas réussi à gagner un nombre minimum d'utilisateurs. Ce n'est que lorsque l'effet de réseau se met en place qu'il faut sérieusement s'inquiéter chez Facebook. Mais il ne sera alors plus aussi simple de racheter un concurrent émergent, comme Instagram ou WhatsApp à l'époque. Les gens feront davantage confiance à un nouveau système démocratique basé sur la blockchain qu'à l'actuel leader Facebook, qui a effectivement abusé de leurs données de manière parfois honteuse par le passé.

La blockchain : une tornade ou une brise tiède ?

La technologie blockchain est déjà placée au même niveau que les plus grandes innovations telles que l'imprimerie, l'électricité, la radio ou Internet. Mais la blockchain et ses différentes possibilités d'application doivent encore faire leurs preuves - et elles le feront ! À l'époque où les premiers ordinateurs personnels sont apparus, on se demandait sérieusement ce que l'on pourrait faire avec un ordinateur à la maison. Aujourd'hui, ils font partie intégrante de notre vie. Dans 20 ans, notre monde sera très différent, notamment grâce aux possibilités offertes par la technologie blockchain.

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L'auteur : Jörg Eugster...

... est un pionnier de l'Internet, un ambassadeur de l'avenir et un entrepreneur Internet passionné depuis 1998. Il a notamment fondé les deux plates-formes Jobwinner.ch et Partnerwinner.ch (vendues à Tamedia en 1999) et est cofondateur de Swissfriends.ch (vendu à Edipresse en 2008) ainsi que fondateur d'autres plates-formes Internet connues. Eugster est keynote speaker et chargé de cours dans différentes hautes écoles spécialisées et écoles supérieures. En tant qu'auteur, il a écrit "Après-demain - Un voyage dans le temps vers notre avenir numérique", un livre qui donne envie d'envisager un avenir dont les chances sont bien plus grandes que ce dont nous osons rêver aujourd'hui. Année de publication : 2017 254 pages Editeur : Midas ISBN-10 : 3907100735 ISBN-13 : 9783907100738.

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Cet article est d'abord paru dans l'édition imprimée de Werbewoche 14/2018.

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